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(par Jean-Marc Lebout)

♦ Article annoncé dans le n° 124 de la Revue Musiques Mécaniques Vivantes de l’AAIMM ♦

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Notre animation outre-Atlantique, initialement prévue en août 2020 mais annulée pour cause de COVID, s’est tenue du 27 au 29 août dernier. La pandémie a laissé des traces indélébiles dans nos modes de vie et notre envie de se déplacer que ce soit près ou loin de chez nous.

Le groupe de quarante personnes initialement inscrites en 2020 a fondu à dix-huit. Qu’à cela ne tienne, nous avons maintenu ce voyage exceptionnel et les 18 participants étaient bien tous présents au rendez-vous, le vendredi 26 août, à l’hôtel Hyatt de Schaumburg près de Chicago.

 

Notre programme a, pour les mêmes raisons, été amputé d’une visite mais qui a été remplacée par deux autres toutes aussi passionnantes. Les trois journées ont donc été bien remplies.

La réussite de ce voyage est en grande partie à mettre à l’actif de nos contacts sur place. Sandy et Marty Persky nous ont ouvert les portes des collections privées visitées et de la fondation Sanfilippo auxquelles on n’accède pas sans leur sésame. Les grosses collections ont en effet un régisseur qui assure l’organisation des visites mais aussi, avec l’accord des propriétaires, les sessions d’entretien et d’accordage des instruments quand c’est nécessaire. Il peut aussi être, à l’occasion, le courtier quand un instrument est mis en vente. Ces visites sont aussi d’importance pour les collections elles-mêmes ; un instrument pneumatique, pour être gardé en état de bon fonctionnement, doit être joué régulièrement.

Devant l’hôtel stationne un rutilant ‘school bus’ jaune, il va emmener la bande de collégiens et de collégiennes pour un merveilleux voyage scolaire…

La première journée est toute entière consacrée à la Fondation Sanfilippo qui est la plus importante collection d’instruments pneumatiques que je connaisse. La visite débute dans le majestueux hall d’entrée où nous attend, sur le premier palier de l’escalier d’honneur, un imposant orchestrion Imhof et Mukle à cylindre et dont la librairie ne comporte pas moins de 36 cylindres. L’ouverture de la Pie voleuse de Rossini (1817) nous y est interprétée magistralement par les 438 tuyaux de cet instrument remarquable construit en 1892.

L’orchestrion fonctionne avec un triple système de contrepoids d’un total de 450 kilos de fonte. Les trois poids gèrent : le premier la rotation du cylindre et la première moitié de la pompe ; le second la seconde moitié de la pompe et le plus petit poids actionne la grosse caisse et la cymbale. La vitesse des deux premiers moteurs à poids cités est réglée chacune par un volant à air. Les poids développent assez de force pour jouer deux fois les huit tours de cylindre nécessaires pour jouer en totalité l’air pointé de façon hélicoïdale.

Marty Persky passe en revue le bel ensemble de phonographes de la Victor talking machines, le fabricant reconnu pour la qualité de ses modèles aux Etats-Unis dans la période 1901-1929.

Différents modèles à cylindre avec leur beau pavillon en bois ; les modèles à disque avec leur pavillon externe ou interne puis le puissant et sonore modèle Orthophonic. Pour en apprendre plus sur le procédé de ce dernier modèle, je vous renvoie à notre revue Musiques Mécaniques Vivantes 121 et l’article rédigé par Patrick Desnoulez et Yves Roussel.

Le hall d’entrée n’est pas petit, vous l’aurez compris, et sous l’escalier monumental sont présentés les instruments avec violons à savoir un Phonoliszt Violina modèle B et deux Mills Violano-Vituoso, l’un avec le simple violon et le modèle à double violons.

Il est donc possible de ‘comparer’ les deux techniques, l’une encore totalement pneumatique et l’autre électro-mécanique. Les deux instruments sont contemporains l’un de l’autre, en 1909 le Mills est présenté à une exposition à Seattle et, en 1910, Hupfeld présente son Violina à l’Exposition Universelle de Bruxelles.

Le groupe passe dans la salle de spectacle, sur l’estrade la console de l’orgue de théâtre, elle s’inspire de celle installée au Paradise Theater de Chicago mais l’orgue lui-même vient du Riviera Theater à Omaha (Nebraska). Le concert d’orgue est prévu pour cet après-midi, Marty et Jerry Biasella qui le seconde ce matin, nous proposent de découvrir préalablement les orchestrions qui s’alignent contre les murs latéraux. Le choix est cornélien, il sera impossible de tous les écouter… et de tous vous les décrire…

Le seul Solophone du gantois Pierre Eich présenté dans un meuble avec des chambres latérales.

Le Pierre Eich Solophone est intéressant dans la mesure où le piano est accompagné de 59 flûtes (de quatre tonalités différentes) pour le chant et d’un second registre de 12 notes pour le contre-chant. Musicalement cela situe l’instrument entre les petits Hupfeld Helios et les Hupfeld Pan. Les rouleaux qu’Eich produit pour cet instrument et qui tiennent compte de son jeu de flûtes particulier, lui permettent, pour les airs d’opéra, de jouer dans la sonorité d’un orchestrion allemand mais pour des airs populaires de danse de jouer plutôt comme un petit orgue de danse belge avec le piano seulement en accompagnement. Un même instrument offre une double casquette à son utilisateur.

Un Popper Salon Orchestra modèle 1 prend le relais. Sa façade élégante et finement sculptée est rehaussée par une grande vitre ronde peinte qui laisse encore entrevoir quelques-uns des 39 tuyaux. L’ensemble piano/flûtes (violon et cello) est complété de nombreuses percussions. Le rouleau joué rend bien les possibilités de ce modèle sans que les percussions ne dominent trop dans le volume musical.

La firme Popper & Co fut l’une des plus productives d’Allemagne (Leipzig 1890-1930) et ce modèle d’orchestrion Salon Orchestra était son modèle standard entre 1912 et jusque dans les années 1920. Le meuble pouvait prendre différentes livrées en fonction des exigences de l’acheteur.

Vient ensuite le tour d’un Philipps Pianella Mandoline modèle 15. Cette très belle machine datant de 1912 est le seul exemplaire encore existant et qui présente 13 flûtes Basson pour renforcer les notes basses du piano. Il est doté aussi de fonctions d’expression sur le piano et les percussions ce qui n’est pas standard sur ce type d’instrument. Ces options montrent l’étendue et la qualité musicale recherchée par les fabricants. Celles-ci ayant un coût, leur mise en œuvre n’est pas systématique.

Philipps & Söhne de Francfort est représenté aux USA par la société Wurlitzer basée à Chicago qui n’a pas hésité à apposer sa propre marque sur certains instruments.

Vous me direz, on est aux Etats-Unis et pas encore un orchestrion américain à l’horizon !

Effectivement, ils sont logés dans le sous-sol, au saloon où nous sommes invités pour le ‘lunch’. Nous sommes plongés dans les années 1925-1930 : très long bar de plusieurs mètres, miroirs, fontaines à soda, roulettes de comptoirs, crachoirs pour les chiqueurs de tabac, la mythique caisse enregistreuse ‘National’, rien ne manque …  Côté musique un choix inégalable de Wurlitzer, Seeburg, Coinola de toutes tailles. Mais mon attention s’est portée sur quelques instruments plus rares que les célèbres marques citées plus haut et qui le sont restées si elles ont pris, plus tard, la bonne décision de s’engager dans la fabrication de juke-box.

Un peu à l’écart, un beau Wurlitzer Tonophone. Ce piano à cylindre est une véritable exception dans le paysage américain où le rouleau de papier à musique est le standard. Rudolph Wurlitzer, immigré allemand, s’installe à Cincinnati en 1853 et y ouvre un commerce d’instruments de musique qu’il importe d’Allemagne. Les affaires sont florissantes. Il trouve un arrangement pour la fabrication de pianos et d’orgues mécaniques avec Eugène de Kleist, lui aussi d’origine allemande. Ce dernier est devenu facteur d’orgue par des formations auprès de facteurs européens réputés dont, entre autres, Limonaire à Waldkirch. Il s’installe à Londres où il fabrique des orgues à cylindres pour les forains et exporte vers les USA. Lorsqu’en 1892, les américains mettent des taxes importantes sur l’importation d’instruments de musique y compris les instruments mécaniques (donc aussi les boîtes à musique suisses), de Kleist s’exile à New York et y fonde la North Tonawanda Barrel Organ Factory en 1893. Wurlitzer lui assure une relative tranquillité commerciale en lui garantissant la vente de toute sa production avant de se porter acquéreur de l’entreprise en 1908.

Pour en revenir à notre Tonophone, ce n’est  pas un simple piano mécanique mais déjà un instrument pneumatique qui se rapproche du Pianista de Fourneaux à la différence près que le système est monté dans le piano et que ce n’est pas un meuble extérieur à disposer devant un piano.

L’introduction du Wurlitzer Tonophone date de 1898. On estime que 1000 à 2000 furent fabriqués. Il sera rapidement remplacé par le Pianino à lecture de papier à musique.

Mais le Tonophone n’aura qu’une brève existence, le cylindre pointé ne présente pas assez de souplesse. Wurlitzer demande à de Kleist de produire un petit orchestrion à rouleau de papier : le Pianino à monnayeur suivi par d’autres modèles, il apparait en 1902.

Un trio emblématique de petits orchestrions américains comme il devait y en avoir dans le moindre débit de boisson. Leur petit format et leur musicalité pas trop puissante étaient appréciés par les tenanciers. Produits par des sociétés concurrentes, elles se faisaient une lutte de chaque instant pour occuper le terrain.
A gauche : un piano avec effet mandoline de marque Peerless 44, vers 1900;
Au centre : un piano mandoline et un jeu de 44 flûtes de la marque Wurlitzer Pianolin (style B), en fait fabriqué par Eugène de Kleist, vers 1914;
A droite : un piano mandoline de la marque Electrova (style 44), vers 1909.

Le grand moment arrive quand nous sommes conviés à rejoindre la salle de spectacle. Marty nous propose de visiter les cinq chambres qui contiennent toute l’instrumentation de l’orgue.

80 registres, cela constitue une forêt de tuyaux qui sont disposés sur trois étages !

Vue plongeante sur les tuyaux en bois, en laiton, des petits, des grands… Dans le fond du cliché, ne manquez pas les énormes jalousies. Certaines chambres occupent un volume sur une hauteur de deux étages.

Jay Warren, organiste spécialisé dans l’accompagnement musical des films muets.

Jay Warren sera notre organiste pour une heure et demie. Il s’est fait une spécialité de l’animation des films muets et nous fait revivre cette époque révolue. Il compose et interprète ses créations sur les plus grands orgues de théâtre de l’Illinois qu’on trouve au sein des universités de Chicago et d’Aurora mais aussi sur celui de la fondation Sanfilippo. Il a porté son choix sur un court métrage d’une demi-heure de Buster Keaton, ‘Steamboot Bill Jr’.

Une histoire manichéenne dont le cinéma américain s’est fait une spécialité et qui ‘’rassure’’.

Tout le talent de l’organiste est de donner la touche de couleur nécessaire à l’expression des  sentiments qui défilent sur la toile tout en supportant simultanément aussi la trame de fond de l’histoire. Un art que Jay maîtrise à la perfection. Pas de fausses notes, un happy end, que rêver de mieux avant de nous rendre au Pavillon du Carrousel !

Je ne me suis pas étendu sur la magnificence de la maison principale avec les éclairages monumentaux récupérés à l’occasion de démolitions de bâtiments art déco, les lampes Tiffany sur le moindre guéridon, les sculptures en bronze, les moquettes épaisses…

Ce n’est pas un musée, c’est une maison d’habitation avec les canapés pour s’installer et écouter agréablement et en toute quiétude les instruments. Cela s’appelle une expérience…

Le Pavillon du Carrousel regroupe la collection d’orgues de danse et de foire et le fameux et fabuleux carrousel Eden Palace.

L’espace est divisé en deux parties par le décor forain qui cache à la vue le galopant. A l’avant du décor, se situe une grande esplanade, comme un champ de foire. Les orgues sont distribués le long des murs, le sol est en revêtement de briques de rue, quelques arbres artificiels sont disposés de-ci de-là et, au centre, une horloge monumentale termine de donner l’impression d’être en extérieur. La fête foraine est permanente, les orgues Limonaire, Gaudin, Gavioli, Bruder, Artisan se succèdent dans une folle ambiance de kermesse.

Une pizza party est organisée sur place en guise de souper.

Au fond du cliché, un Gaudin 110 touches et à droite un orgue de rue du facteur Johnny Verbeeck.

Embarquement sur le manège Eden Palace que Jasper et Marian Sanfilippo ont sauvé, restauré et surtout laissé accessible au public.

Le manège fonctionne, pour des raisons pratiques, à l’électricité mais sa chaudière à vapeur originelle est encore présente et en état de fonctionnement. Pour deux tours de manège, il était peu opportun de porter à ébullition l’eau de la cuve pour atteindre la pression suffisante à l’entraînement du manège.

Un peu d’histoire, la dénomination Eden Palais a été utilisée à plusieurs reprises comme nom d’un carrousel salon. Je reprends ici une partie des informations données par Marc Grodwohl qui a été une cheville ouvrière à l’Ecomusée d’Alsace où un Vélocipède (identique à celui du Musée des Arts forains de Jean-Paul Favand à Paris) était accessible au public jusqu’en 2011 avant sa mise en vente (incompréhensible à mes yeux).

L’Eden Palace, construit vers 1890 pour Henri Lamberty, dont la fille épousa un Caron, est vendu en 1914 lorsqu’Henri Lamberty prit sa retraite. Cet Eden Palace disparait, sans laisser aucune trace.

Le premier manège portant le nom de Eden Palais et dont on perd la trace après sa vente en 1914.

L’Eden Palais dans sa version première, le nom d’E. Bruckman est masqué par une étiquette G.Demeyer-Bodelle.

Affiche publicitaire pour le Carrousel-Salon Eden Palais.

Les frères Frédéric et Philippe Caron exploitent leur premier carrousel « Eden Palais », dont la tournée passe par Mulhouse en 1924, 1925,1926.

En 1927, les deux frères Caron achètent un carrousel-salon du début du siècle. Sur une photographie de celui-ci (non datée), le fronton de ce carrousel-salon porte une étiquette rapportée avec l’inscription G. Demeyer-Bodelle. Le nouveau manège Caron prend le même nom que le précédent, Eden Palais, après avoir été mis au goût du jour, d’élégants vitraux en forme de papillons remplacent le décor peint de la façade aveugle. C’est cet Eden Palais qui embellit la foire de Mulhouse dans la décennie 1930 puis jusqu’en 1950 ou peu après. En 1959, l’Eden Palais quitte la France pour les USA. Son acquéreur, un parc d’attraction dans le Colorado, ne réussit pas à le reconstruire, faute de plans et aussi faute de moyens financiers. Abandonné en extérieur et sous la neige, il est acquis par un couple du Montana qui le remonte partiellement mais qui n’arrivera jamais à le faire fonctionner. Un dernier acquéreur, la famille Sanfilippo, en fait l’acquisition en 1987 et en a entrepris la restauration, menée à son terme en 1997. Néanmoins il n’en subsiste que la cavalerie et son plafond (« ballon ») et la façade principale, les façades et plafonds intérieurs ayant disparu (ceux formant le promenoir ndlr).

Les trois cartes postales ci-dessous donnent un bel aperçu général de ce qu’est un carrousel-salon. J’ai retrouvé le commentaire suivant d’un petit fils Tewe qui, à propos de son grand père, dit : « En ce temps-là, Antoine Cornélius Tewe, mon grand-père, exploitait un carrousel à vapeur et, comme d’autres forains, il commença par enfermer son manège dans des abris de plus en plus grands afin de protéger le public des intempéries et de le retenir plus longtemps ».

Cartes postales du carrousel salon de la famille Tewe. Remarquez le superbe promenoir et sa très belle décoration.

Le galopant est sonorisé par un puissant Gavioli 89 touches.

Les participants devant l’Eden Palace, le tour de manège est imminent ! L’AAIMM fédère les amateurs francophones de musique mécanique, le groupe reflète parfaitement cet état de fait puisque composé de 7 Français, 8 Belges et 3 Suisses.

Cette course marque la fin de cette journée mémorable tant pour les novices que pour ceux qui avaient déjà goûté aux joies de cette collection.

Le retour est bien calme dans notre bus scolaire, nous sommes encore tous sous le charme et nos oreilles tintent toujours des sonorités si typiques de ces orgues.

Merci à Marty, Jerry et Jay pour cette journée ! Sans oublier non plus d’honorer la mémoire de Jasper Sanfilippo dont la fondation, dirigée par son fils Jeffrey, perpétue sa passion pour la musique mécanique.


La journée du dimanche est consacrée à la visite de deux collections, celle de Sherrie Krughoff et Wayne Wolf.

Sherrie nous reçoit personnellement avec la joie de revoir des amis connus et de nouveaux visiteurs (des ‘first timer’ comme on dit ici) avec qui partager sa très belle collection d’orchestrions. Nous avons le plaisir d’écouter plusieurs airs sur chacun d’eux.

Trois Hupfeld sont à notre programme, un Symphonie Jazz modèle 19, un Pan modèle 1 et un Helios II-25.

Le Pan est le plus ancien mais il est d’une sophistication technique telle que ce type d’orchestrion est considéré, autant par les amateurs que les musiciens, comme le plus réaliste jamais produit, celui approchant le plus le jeu musical de l’instrumentiste. Pour les lecteurs qui voudraient connaître en détail la composition musicale et le degré incroyable de nuance qui peut être apporté sur l’instrumentation, je vous renvoie vers le livre The Golden Age of Automatic Musical Instruments d’Arthur Reblitz qui le détaille. Destiné, à l’origine,  à un établissement hollandais, l’orchestrion est équipé d’un chargeur supportant 10 rouleaux de papier à musique.

Le Symphonie Jazz dérive du Pan mais les flûtes y sont du genre saxophone et pas violon et clarinette comme dans le Pan. Il comporte aussi des expressions sur l’instrumentation présente. Seule une douzaine de ces instruments Hupfeld subsiste encore aujourd’hui.

Hupfeld Pan modèle 1, Leipzig – Allemagne. Produit à partir de 1912 jusqu’à la fin des années 1920.

Hupfeld Symphonie Jazz produit dans les années 1920 avec une instrumentation particulière adaptée à rendre les sonorités de ce nouveau genre musical.

Weber Unika de 1926 avec une scène animée rapportée.

Hupfeld Helios II-25, imposant meuble de près de 3 mètres de haut. Des registres automatiques contrôlent l’instrumentation y compris le piano, seules les cloches ne sont pas registrées mais directement jouées par une série de trous de la flûte de pan.

Le Phonoliszt Violina est un instrument particulièrement agréable et le modèle A de Sherrie ne fait pas exception. Ces instruments sont aujourd’hui devenus rares malgré une production qui avoisine les 10.000. La cause principale est à trouver dans la difficulté à les faire rejouer correctement après leur mise à l’arrêt, parce que ‘dépassés’, et ayant souffert des mauvaises conditions de stockage.

Sherrie tient à nous remercier de notre longue visite et nous tourne un carton sur son orgue Verbeeck, un 36 ou 45 touches, je ne me souviens plus.

La collection de Monsieur Wolf nous attend, il est tout aussi honoré de notre visite.

La partie Phonographe est intéressante par la présence d’au moins deux pièces vraiment rares : un Autophone de salon et un phonographe Class M de Thomas Edison. Cet inventeur de génie s’est très tôt intéressé  à la reproduction du son avec, en 1877, la mise au point du phonographe à feuille d’étain plus connu sous son vocable anglais ‘tinfoil’. Il se consacre ensuite durant 10 ans à des travaux sur l’électricité et, en 1888, pense à l’électrification du phonographe qui a évolué sous la houlette d’autres fabricants. La rotation du mandrin portant le cylindre est assurée par un moteur électrique alimenté par une pile et la perception du son se fait par des écouteurs. L’Exposition Universelle est un grand événement mondial, tant du point de vue politique et technique qu’économique. C’est une vitrine d’une indéniable importance où le génie des pays peut rivaliser avec force. Conscient de l’enjeu, Thomas Alva Edison traverse l’Atlantique et vient à Paris. Ses inventions sont présentes dans trois domaines innovants : l’électricité, la téléphonie et le phonographe. Présenté à l’Exposition, l’appareil Class M est la vedette incontestée avec la tour Eiffel. Plusieurs gravures de l’époque montrent la foule dans une file d’attente ou entourant un appareil, les écouteurs aux oreilles.

Le deuxième instrument rare est l’Autophone de l’American Phonograph Co installée à San Francisco et ayant une succursale à New York. Il est rare dans sa présentation de salon, c’est-à-dire sans monnayeur et dans un meuble fermé alors que la version vitrée et à monnayeur, destinée aux lieux publics et aux présentations foraines, est plus régulièrement rencontrée.

Phonographe Class M, notez les deux piles électriques situées derrière la machine et qui le font fonctionner.

Autophone avec ses 12 cylindres, il n’est pas électrique et fonctionne avec l’énergie d’un ressort qui, remonté à fond, permet d’écouter les douze cylindres. Notez aussi que le pavillon est interne au meuble. Vers 1905.


Cette troisième journée nous propose trois points de chute : le Halim Time and Glass Museum (HTGM), les collections de Caroll Veome et de Sandy et Marty Persky.

La collection du HTGM s’articule autour de deux domaines totalement différents, la sauvegarde du patrimoine verrier américain  avec Louis Comfort Tiffany en figure de proue et une collection de pendules que l’atelier du musée restaure et entretient minutieusement. Parmi les 1.100 pièces, pas toutes exposées, de nombreuses sont à musique et ou à automates. De quoi amplement nous satisfaire…

Le Studio Tiffany, actif de 1878 à 1933, est bien connu pour ces luminaires auxquels l’avènement de l’électricité a assuré une production importante et qui fait, encore aujourd’hui, l’objet de nombreux copiages. Les ateliers vont produire des verres de textures différentes et ainsi obtenir des effets opalescents, iridescents, nervurés qui feront la renommée de l’établissement. Une activité importante sera consacrée au vitrail tant profane, pour de riches demeures patriciennes, que religieux pour les nombreux courants théologiques qui se développent à cette époque. Ce sont principalement ces créations souvent monumentales et à chaque fois uniques que le musée tente de préserver et expose avec une mise en valeur parfaite au niveau des éclairages. La préservation est à comprendre dans le sens où les vitraux monumentaux n’étaient pas détruits lors de la destruction des bâtiments pour lesquels ils avaient été conçus mais démembrés en sous éléments plus petits, plus facilement vendables, mais cela faisait perdre la cohérence du travail de départ.

La partie du musée consacrée aux pendules est spectaculaire au niveau de la qualité des objets exposés. Certaines pendules à automates ou à musique font l’objet d’une vidéo qui montre les mouvements exécutés ou entendre l’air musical. Je ne m’arrêterai que sur quelques-unes d’entre elles.

Cette pendule squelette de François Sagniez, maître horloger à Genève entre 1775 et 1791, actionne, à chaque heure, un carillon de 13 timbres frappés par 26 marteaux. Un grand cylindre en laiton porte les picots déterminant l’air joué, un moteur à fusée fait fonctionner cette musique. Cet ensemble préfigure les cartels à musique tels ceux de Nardin, le jeu de timbres étant alors remplacé par des lames.

Superbe ensemble de trois cages à oiseau chanteur à suspendre au plafond. Le cadran est donc situé à la base de la cage. Jaquet Droz est réputé pour ce type de montage même s’il ne fut pas le seul à en produire.

Cette horloge à orgue impressionnante aurait été offerte à Napoléon Bonaparte par la ville de Lyon en commémoration de la campagne d’Egypte.

Impressionnante horloge à orgue, déposée sur un socle contenant aussi un orgue. Conception pour un amateur éclairé qui souhaite un air court à chaque passage de l’heure et un récital plus long avec le second orgue qui est à cylindre spiralé. Un des trois cylindres disponibles joue la Flûte enchantée de Mozart.

Pour le plaisir des yeux, ces quatre pendules à musique et automates sont des fabrications anglaises du dernier quart du XVIIIe siècle. Principalement destinées aux marchés orientaux, dont la Chine, ces pendules sont aujourd’hui particulièrement recherchées par les collectionneurs.

Un très beau musée qui vaut vraiment la peine que l’on s’y arrête.


Notre première visite de l’après-midi est consacrée à la collection personnelle de Sandy et Marty. Celle-ci est très variée et présente des pièces à musique de qualité au niveau musical surtout parmi les boîtes à musique et les tabatières. Une boite à ouverture est toujours un grand moment d’écoute, presque de recueillement…

Curieuse boîte de gare avec un stéréoscope intégré. C’est le seul exemplaire de ce type que je connaisse.

Marty nous fait valser au son de cet orgue Jaeger & Brommer. Ce fabricant allemand bien connu a réalisé cette copie moderne des orgues tels qu’Ignaz Bruder en construisait, également à Waldkirch, entre 1806 et 1845.

Nous gagnons ensuite le domicile de Carol  Veome. Cette collectionneuse mélomane est venue à la musique mécanique par son intérêt pour la musique classique et les interprétations différentes qui pouvaient être proposées en disques 33 tours par les musiciens virtuoses. De plus anciennes interprétations existantes et jouées directement sur un instrument l’ont tout naturellement intéressée. Sa collection offre un bel éventail d’instruments de grande qualité musicale : un Steinway reproducteur, un Seeburg G ; dans le genre musique à disques, une grande console Stella Orchestra (disque de 65,3 cm), une Empress Concert Grand (modèle Mira style 297 vendue par Lyon & Healy). La musique à cylindre n’est pas oubliée avec une boîte orchestre de Baptiste-Antoine Brémond à 7 cylindres à 6 airs.

Cartel Orchestre de Baptiste-Antoine Bremond vers 1875. Le répertoire des grands cartels est toujours orienté vers la reprise et l’arrangement de grands airs classiques. Pas étonnant donc de le retrouver dans cette collection.

Cette visite clôture cette animation de trois jours particulièrement réussie que l’AAIMM a proposée à ces adhérents et qui s’est déroulée sans anicroche grâce au soutien local que nous ont apporté avec bienveillance Marty et Sandy Persky que nous ne pourrons assez remercier !