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par Yves Strobbe

♦ Article paru dans le n° 102 de la Revue Musiques Mécaniques Vivantes de l’AAIMM ♦

Quelques compositeurs se sont plus à imiter d’autres instruments au piano ; certains ont évoqué par l’usage de procédés choisis des cuivres, des cloches, le jeu de la mandoline ou de la balalaïka avec leurs notes répétées, le chant des oiseaux, etc… …et tant qu’à faire, grâce une imagination créative débordante, il y en eut même qui maîtrisèrent leur instrument à clavier au point d’en faire un orchestre symphonique de salon ! Tandis que d’autres se sont attaqués à la musique mécanique. L’analyse des cinq partitions suivantes révèlent des aptitudes variées de leurs auteurs lorsqu’il s’agit de suggérer l’univers sonore de « la » boîte à musique.
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Une vidéo est accessible permettant d’écouter certaines partitions évoquées dans cet article => Voir la vidéo

Trop souvent, les compositeurs prétendant imiter une boîte à musique en donnent une image déformée : ils forcent volontiers le trait du caractère mécanique et « minuscule » de l’instrument en usant abusivement de notes aiguës piquées et donc sèches, sans égard pour les efforts consentis par les fabricants de boîtes à musique afin d’améliorer la beauté du son de leurs pièces, notamment en veillant à la souplesse des lames et en procédant au lestage des basses.

Ici, les pianistes-compositeurs- imitateurs ont, par le biais de leur écriture, oeuvré à la façon de ces mimes-automates qui se bornent à donner l’impression, via des gestes saccadés (peu naturels) d’être de vrais personnages mécaniques – certes au prix de réelles prouesses telles que la fixité du regard et une certaine raideur des membres corps-, mais souvent sans se soucier du but d’un automate… …alors que les automaticiens se sont évertués à créer l’illusion d’un être vivant (à échelle réduite ou réelle) réalisant une action avec des gestes coulés, soit les moins saccadés possibles, donnant une impression de naturel ! De plus, les vrais automates ne sont pas -pour la plupart- que des répliques animées d’êtres vivants (animaux ou humains) dont les mouvements ne correspondent à rien de concret : du plus simple au plus sophistiqué, ils décrivent une action voire une profession  : ils sont jacquemarts, danseurs, acrobates, clowns, magiciens, musiciens, peintres, écrivains, etc… sans oublier les oiseaux chantant et parfois « sautant » de branche en branche !

Que doivent donc bien penser les créateurs d’automates des mimes-automate ? Sans doute ce que pensent les fabricants de boîtes à musique et les arrangeurs en entendant les caricatures pianistiques dont leur art fait l’objet : une vraie boîte à musique n’est pas faite pour donner l’impression d’être une mécanique, mais d’abord et avant tout pour permettre d’écouter de la musique, le plus souvent sous la forme d’un arrangement c’est à dire d’une transcription plus ou moins savante.

Voici un classement de cinq partitions anciennes par ordre de qualité croissante considérant le seul critère imitatif (sans souci d’ ordre chronologique)  :

Partition 1 :

Quelle piètre imitation ! Notes aigües piquées (parfois en plus en valeurs brèves ! : très sèches), des silences qui interrompent de façon abrupte le flux d’une musique d’esbrouffe, freinée par d’imcompréhensibles ralentendi (ralentis)  : bref, une partition d’un style assez éloigné de la boîte à musique ; ce serait plutôt un exercice pour pianistes vu le tempo à ce point rapide.

Le titre « La Vraie boîte à musique » comme le dessin du frontispice de la partition font office de publicité mensongère : ce n’est pas une fantaisie imitative, mais une imitation fantaisiste  ! Bref, du bas de gamme malgré de nombreuses notes aigües !…

Téléchargement de la partition <=

 


Partition 2 :

Bien que présentant des défauts communs avec la partition de A. Godefroy (notes aiguës piquées) et l’indication « automaticamente » ( !), cette page, bien que peu réaliste est quand-même musicalement plus inspirée que celle d’ A. Godefroy.

Une composition (avec des notes aigües piquées) sinon pas trop rapide et d’un style plutôt agréable, qui serait celui d’un carillon plutôt que de la boîte à musique…


Partition 3 :

Sans éviter le piège des notes aigues et piquées (en plus d’un tempo irritant par sa rapidité), on se rapproche davantage de la boîte à musique dans un mélange de style mêlant à la fois le folklore suisse et le XVIIIème avec la basse d’Alberti à la main gauche (plutôt que le XIXème qui fut le grand siècle de la boîte à musique) mais, après tout, il existe bien des boîtes à musique jouant Mozart (notamment sa sonate n°16 KV 545 dite facile).

 


Partition 4 :

Cette pièce est la sixième du recueil  » En vacances » op. ? (1911). Le compositeur fait des aiguës des notes perlées. Sans être d’un réalisme absolu, il y rend à sa façon la magie et la poésie dont certaines boîtes à musique anciennes ont le secret. Malheureusement, la transcription de cette partition pour une vraie boîte à musique doit être techniquement difficile… …et c’est bien dommage, tant elle est jolie !

=> Téléchargement de la partition

 

 

 

 

 

 


Voici enfin deux compositions modernes :

- Frank Mills (né en 1942) ; Music Box Dancer (1974) ; en voici une version simplifiée (sans « orchestration ») : https://www.youtube.com/watch ?v=fC5UVVLQXGQ Tout en quittant l’univers de classique ou romantique pour celui de la variété, on ne pourrait être plus réaliste ! Et pour cause : cette pièce (charmante pour les uns/niaise pour les autres), autrefois largement diffusée sur les ondes (popularisée notamment par Richard Clayderman), a été arrangée pour des boîtes à musique de différents formats ; écoutez plutôt :

https://www.youtube.com/watch ?v=pHZ3LrKshME

https://www.youtube.com/watch ?v=ydX8NNIjTN0

https://www.youtube.com/watch ?v=FgLnxFLy67s

- Guido Reuge (1904-1994) ; Guido Waltz (date inconnue) : cette valse en trois parties est une véritable composition originale pour -et jouée par- une vraie boîte à musique ! https://www.youtube.com/watch ?v=ABulpIDTF0E

Conclusion :

De façon générale, une boîte à musique jouant un arrangement d’une composition pour piano (ou une composition originale) est nettement préférable à une partition d’un pianiste-compositeur tentant d’imiter une boîte à musique !

https://www.youtube.com/watch ?v=C2lARVYwolU

https://www.youtube.com/watch ?v=dDLTmnPB2yk